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Le symétrique, meilleur que l'asymétrique Fantasme ou réalité ?

                                    

                             prise symétrique XLR                                               prise asymétrique RCA ou cinch

 

Aujourd’hui alors que dans nos chaumières le numérique progresse à grands pas, la question d’une liaison symétrique ou asymétrique entre les appareils qui constituent la chaîne de reproduction sonore continue à se poser à la plupart des audiophiles en quête d’une certaine perfection sonore. Pourtant, au-delà d’un simple problème de connexion, le symétrique et l’asymétrique relèvent avant tout de philosophies techniques différentes.

 

Petit rappel technique

- Le signal musical est constitué d'une multitude de sinusoïdes qu'il s'agit de faite passer d'un appareil à l'autre, sans en affecter l'intégrité ou la bande passante. Pour ce faire, on utilise une référence, le niveau 0, sur lequel on se basera pour définir l'amplitude du signal, et une décomposition positive et négative dudit signal qui en définit La fréquence.

 

- Dans une liaison asymétrique conventionnelle, comme celle que l'on trouve sur la grande majorité des appareils de haute-fidélité traditionnelle, un seul conducteur transporte le courant alternatif qui correspond au signal modulé. Autour de ce conducteur, on trouve une tresse chargée de véhiculer la masse. Cette dernière permet de blinder le câblage, et sert en même temps de référence au signal, en définissant le point 0 de la sinusoïde.

 

- Dans une liaison symétrique, munie de prise XLR, le signal transite par l'intermédiaire de deux connecteurs parfaitement distincts. Le premier, baptisé « point chaud » ou « conducteur chaud », véhicule le courant du signal en phase ; le deuxième, le « point froid », véhicule le même courant, mais en phase opposée (d'où le terme « symétrique »). Un troisième connecteur permet de relier la tresse de masse entre les deux appareils, et a pour seul rôle de blinder la liaison en empêchant les perturbations de contaminer le signal. Elle n'a aucune fonction de référence, puisque celle-ci peut être facilement calculée à partir des signaux inversés qui transitent par les deux autres conducteurs.

 

Les caractéristiques du symétrique Une connectique professionnelle qui en a fait rêver plus d'un. Concrètement, la liaison symétrique, qui fut d'abord conçue pour un usage professionnel, comporte de nombreux avantages. Dans ce type de liaison, comme l'amplitude 0 volt de la sinusoïde est déterminée par le différentiel entre les phases inversées du signal, la masse n'intervient pas dans la reconstitution de ce dernier, et se contente de jouer le rôle de blindage dans des conditions optimales. Les perturbations qui peuvent la parcourir sont renvoyées vêts la Cette, cette dernière ne pouvant pas non plus affecter l'intégrité de la musique. En asymétrique, comme le blindage sert également de référence au signal, toute perturbation électrique captée pat ce dernier affecte directement la valeur de la masse, donc de la référence !

 

Encore plus fort : dans une liaison symétrique, les deux connecteurs sont parcourus par des courants modulés décalés de 180 degrés l'un par rapport à l'autre. Le signal asymétrique que l'on pourrait reconstituer à partir de ces deux phases inversées est donc déduit de leur somme, l'une des phases étant retournée pour constituer un miroir à l'autre. Dans ces conditions, toute perturbation électromagnétique qui, passant outre le blindage, aurait affecté le premier signal, se trouverait annulée par la phase inversée de cette même perturbation sur le second ! Une bonne manière de mettre fin aux différents buzz qui affectent une chaîne d'appareils reliés par un câblage de grande longueur.

 

Pourquoi tous les appareils ne bénéficient-ils pas de possibilité de liaison symétrique ?

A la lecture de cette première partit technique, certains d'entre vous doivent se demander pourquoi l'on n'utilise pas systématiquement des liaisons symétriques entre les appareils d'une chaîne haute-fidélité. Après tout, si cette liaison permet d'échapper à la totalité des perturbations électriques susceptibles d'affecter le signal en transit, elle devrait s être généralisée depuis longtemps.

 

Dans les faits, les choses ne sont pas si simples. Dans la très grande majorité des cas, les constructeurs de matériel électronique ne peuvent se permettre de concevoir des appareils fonctionnant en symétrique. Cela reviendrait, ni plus ni moins, à doubler l'ensemble des composants de la machine, faisant grimper les coûts de fabrication de manière vertigineuse. En d'autres termes, transporter le signal en symétrique, entre deux appareils qui ne le sont pas, nécessite deux transformations ; la première pour rendre le signal symétrique, la deuxième pour le désymétriser. C'est là que le bât blesse ! La technologie de liaisons asymétrique a fait beaucoup de progrès, en matière de blindage et d'isolant.

 

De la difficulté d'obtenir un signal symétrique à partir d'un signal asymétrique

Pour symétriser un signal, on commence par diviser son courant en deux afin d'obtenir deux signaux identiques, puis la phase de l'un d'eux est inversée avant d'être finalement dirigée vers le connecteur. Dans l'autre sens, on récupère les deux courants inversés, le niveau 0 est obtenu en superposant les deux phases, puis on retourne « dans le bon sens » celle qui a été inversée, avant de les additionner pour retrouver le signal asymétrique. Deux opérations qui peuvent paraître simples mais qui nécessitent des conditions idéales pour ne pas altérer le signal au passage.

 

La meilleure façon de symétriser un signal consiste à passer par un transformateur symétriseur, qui va séparer totalement la masse de la sinusoïde. Malheureusement, ce composant demande une qualité de fabrication remarquable, sous peine d'émasculer complètement le signal, aussi bien en termes de dynamique que de bande passante. Sur la plupart des amplificateurs à tubes qui fonctionnent selon ce schéma, sans parler des consoles et du matériel professionnel en général, le prix du transformateur influe de manière significative sur le prix de vente final. L'autre solution, que l'on retrouve sur un grand nombre de sources grand public et de préamplificateurs équipés de sorties symétriques, consiste à utiliser un circuit électronique en lieu et place du transformateur.

 

Si l'évolution des technologies permet aujourd'hui d'obtenir d'excellents résultats avec cette méthode, elle ne peut rivaliser avec un transformateur, notamment en matière de masse électrique, qui nécessite souvent d'être désolidarisée de celle de l'appareil ,pour ne pas recréer les problèmes de boucle de masse, particulièrement nocive pour le signal musical ! Dans le cas où l’appareil sortirait un « vrai » signal symétrique, le problème se pose différemment. Pour désymétriser le signal, il suffit pratiquement de brancher le deuxième signal sur la masse du câble asymétrique, causant une baisse considérable du niveau, puisque ce signal passant par la masse constituera désormais la référence 0 volt de la liaison ainsi constituée.

 

Un choix qui dépend avant tout des moyens mis en œuvre

Etant donné tous ces problèmes, et compte tenu de l'expérience que nous pouvons en avoir, le symétrique ne constitue pas la solution miracle à toutes les liaisons audio de votre système. Si l'on prend conscience que la plupart des appareils du marché fonctionnent en asymétrique, si l'on considère les progrès réalisés, notamment en matière de gaine et de blindage, sur les câbles asymétriques, il est bien souvent préférable d'avoir une bonne liaison asymétrique qu'une mauvaise liaison symétrique qui devra composer avec les différentes étapes de transformations inévitables entre les maillons du système.

 

Le résultat musical de ce type de montage peut ainsi manquer cruellement de modulation, de chaleur, et voir sa bande passante sérieusement compromise, notamment dans le bas du spectre, pour donner naissance à un squelette décharné en lieu et place de la belle voix profonde et soyeuse d'Ella Fitzgerald ! D'autant plus que les conditions d'utilisation rencontrées par les particuliers n'ont pas grand-chose à voir avec l'environnement complexe et pollué d'une régie-son, où la longueur totale des câbles se compte parfois en kilomètres et où l'isolation électrique de la masse devient l'un des problèmes majeurs rencontrés lors de l'enregistrement. A l'inverse, si vous avez la chance de pouvoir constituer un système de haut de gamme dont tous les maillons fonctionnent en symétrique, de la source jusqu'à l'amplificateur, n'hésitez pas !

 

Les avantages de ce type de liaison s'en trouveront magnifiés dans tous les domaines : meilleur rapport signal/bruit, bande passante vertigineuse et totale invulnérabilité aux parasites et aux perturbations secteur, sans parler de l'isolation électromagnétique qui en résulte. Dans ces conditions, chaque appareil fournira le meilleur de lui-même, en dotant l'interprétation d'une dynamique renversante, d'une précision et d'une enveloppe sonores aussi réalistes que possible. Malheureusement, les fabricants capables de concevoir des appareils utilisant des schémas symétriques et/ou des transformateurs symétriseurs dignes de ce nom se comptent encore aujourd'hui sur les doigts des deux mains, et appartiennent tous au monde de la très haute-fidélité.

 

Antoine Gresland – extrait de la revue Haute-fidélité Juin 2004

 

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